vendredi 25 avril 2008

Aimé Césaire, Le parti socialiste, la France et nous


« Les élus français, dont Ségolène Royal, demandent à ce que le poète martiniquais ait sa place au Panthéon. »

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La gauche aurait donc proposé le Panthéon à Césaire !

Mais... quelle gauche alors ?

Une gauche qui n’a eu de cesse de canaliser et de fédérer le ressentiment des laissés-pour-compte pour mieux s’empresser de l'exploiter à des fins électorales et seulement électorales. Une gauche indifférente qui n’a rien résolu et qui refuse avec obstination de crever l’abcès de la question des français issus - pas seulement mais aussi - du colonialisme, de la traite et de l’immigration, tout en se désintéressant du sort qu’il leur est fait comparé à d’autres minorités et/ou catégories sociales.

Ou bien, une gauche qui s’est montrée incapable de rendre justice et d’accorder une vraie place à ce peuple de France qui n’a jamais pu ou su se rapprocher de la promesse d’égalité et de fraternité pour tous que la République française est supposée porter en elle, faute d’y être encouragés, aidés ou tout simplement, autorisés (sans oublier ce foutu travail qui, aujourd'hui, n’est plus là pour ceux qui n’ont jamais travaillé, et/ou ceux qui quittent notre Education Nationale sans qualification, sans formation, et nos Universités, sans les bons diplômes).


Une gauche qui a joué l’épuisement et qui n’a pas d’autre issue à offrir à tous ceux qui remettent en cause les modes de fonctionnement, d’organisation et les grilles d’analyses de la République : une impasse en forme de cul de sac, le rejet et l'isolement avec pour seule consolation : un SOS racisme enfermé dans sa Tour d'Ivoire moralisante ; comme si le fait de se répandre dans les médias pour dénoncer le racisme pouvait empêcher quiconque de l'être ou bien, de le devenir ; de même, dénoncer « les brûleurs de voitures » n'a jamais dissuadé qui que ce soit de les brûler.


Après l'épuisement, le pourrissement qui donnera naissance au mouvement « Les indigènes de la République » avec ses officiels, ses titulaires et ses suppléants.


Nul doute ! Un job à plein temps avec retraite assurée, ce statut d’indigène auto-proclamé sur le mode du "s'il n'en reste qu'un, je serai celui-là", alors que les autres auront bougé et nous avec eux, et l'histoire aussi ; et le temps qui guérit bien des maux et vient à bout de bien des préjugés - évolution générationnelle et naturelle oblige ! Ce temps qui nous récompense de notre patience et de notre travail - pour peu qu'on s'y soit mis : travail sur soi, pour soi et les autres et avec eux ; le discriminé développant une pensée discriminative à l'endroit de son discriminateur, jusqu'au rejet total, retrouvant ses plumes, ses peintures et son maquillage en bon indigène, fier et digne.

Et que dire d'un Dieudonné condamné à la surenchère permanente ; un Dieudonné qui n’a jamais cessé d’être le symptôme - comme des centaines de milliers d’autres avec lui - d’une maladie à l’origine de laquelle on trouvera un Etat et une classe politique incapables de nous proposer une France adulte, aux analyses honnêtes et courageuses, même au prix d’un froissement de l’orgueil national qui aurait pu donner lieu à un nouvel élan tout aussi national mais... fédérateur celui-là !


Durant la période qui va de 1981 à 1995, on cherchera en vain des Rachida Dati, des Rama Yade dans les gouvernements qui se sont succédés.


Il faudra attendre un gouvernement de droite pour que les compétences de Madame Taubira soient reconnues, convoitées et sollicitées (parmi les candidats à la présidentielle de 2001, sans aucun doute... Madame Taubira était bien la meilleure, et de loin – souvenez-vous !)


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Dans les jours qui ont suivi le décès du poète - paradoxe suprême ! - c’est la droite qui adopte l’attitude, non pas la plus digne mais... l'attitude la plus honnête : profil bas et silence, laissant aux parents, aux proches d'Aimé Césaire, à ses administrés, à son peuple et à ses lecteurs le soin d’accompagner son départ.

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Souhaitons que l’œuvre de Aimé Césaire demeure irrécupérable ou bien, qu'elle le devienne ; aucune gauche ne pouvant prétendre se l’approprier, ni aucune droite.

Quant à réduire l’oeuvre de Césaire à l’anti-colonialisme...

Lorsque l'on sait comme nous le savons aujourd’hui qu’il n’y a rien de plus ridicule qu'une victime qui se croit guérie de la bêtise et de la cruauté de son ancien oppresseur. Et d'autres s'empresseront d'ajouter : justice ou pas, dignité hautaine ou bien servitude volontaire, la domination, qui a toujours pour fins l'exploitation - exploitation intemporelle, sans visage, sans couleur et sans frontières - n'est-elle pas ce qui réussit le mieux à l'homme quand la nature et un savoir-faire éculé l'ont placé du côté de ceux qui savent ordonner, contraindre et dominer ?


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On ne dira jamais assez que Aimé Césaire était loin de n’être qu’un poète anti-colonialiste même si son œuvre fait partie intégrante du patrimoine politique français.

Une langue d’une invention égale à celle d’un René Char que celle de Aimé Césaire ; René Char, une autre grande voix, résistante de surcroît, elle aussi... jusqu’à son dernier souffle।


Serge ULESKI


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