vendredi 18 avril 2008

Ce qu'on retiendra d'Aimé Césaire, selon le président Abdoulaye Wade


DAKAR (AFP) — "Ce qu'on retiendra, c'est le chant de la négritude et la lutte contre le colonialisme", affirme le président sénégalais Abdoulaye Wade à propos d'Aimé Césaire, concédant se sentir plus proche du poète antillais que de l'autre "père" de la négritude, Léopold Sedar Senghor.

"Cet homme a consacré sa vie à la lutte pour le peuple noir, à la lutte pour l'indépendance de l'Afrique, à la promotion des valeurs de la négritude", a-t-il indiqué jeudi soir à deux journalistes, dont l'AFP, rappelant avoir rencontré la première fois Aimé Césaire à la Sorbonne à Paris en 1956.

Abdoulaye Wade était "contre la conception de la négritude senghorienne. Les deux ne disaient pas la même chose. Pour Césaire, c'était une sublimation de la valeur noire". "Tous les deux avaient réagi car ils étaient isolés dans un +monde blanc+. On comprend parfaitement leur volonté d'affirmer l'existence d'une civilisation qui n'était pas celle de l'environnement dans lequel ils étaient".

Mais le Sénégalais "Senghor était un poète de sensibilité. Il a voulu mettre en valeur ce qu'il percevait de plus fondamental chez le Nègre, c'est-à-dire l'émotion avec sa malheureuse phrase "+la raison est hellène et l'émotion est nègre+ qu'on lui a toujours reproché". "Le mot de +négritude+ venait de Césaire et pas de Senghor. Senghor lui a donné cette dose émotionnelle qui nous a heurté. Moi, étudiant en mathématiques, on me dit que la raison est hellène et l'émotion nègre, c'est une chose que je ne peux pas accepter. J'étais un des meilleurs en mathématiques".

Mais cette "petite phrase" du "poète-président" sénégalais, qui a suscité une vive polémique dans les milieux intellectuels africains, "n'est pas très grave, c'est une chose qu'on peut lui pardonner", souligne aujourd'hui M. Wade, qui a été l'adversaire politique du président Senghor (1960-80). "Nous avons dépassé le stade émotionnel. Et en cela nous sommes plus proches de Césaire que de Senghor".

"Nous, on contestait Senghor. On l'a toujours contesté", a rappelé le président Wade, qui s'est lancé en politique en créant en 1974 le Parti démocratique sénégalais (PDS) d'inspiration libérale, présenté comme un "parti de contribution" et non d'opposition à une époque où le parti unique était roi. Pour le président Wade, la négritude est née en réaction à la politique d'assimilation menée par la France dans ses colonies, notamment en Afrique et particulièrement au Sénégal.

Cas unique dans les colonies africaines de la France, les habitants de "quatre communes" du Sénégal (Dakar, Gorée, Rufisque et Saint-Louis) ont en effet reçu en 1916 la citoyenneté française et ont rapidement envoyé leurs premiers élus à la Chambre des députés à Paris.

Pour le président Wade, Césaire et Senghor "sont les premiers qui dans un contexte blanc ont pris conscience de la nécessité de faire comprendre qu'ils étaient différents. Ce refus d'être assimilé, ce refus de l'assimilation est une attitude très positive, d'affirmation de personnalités".

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