C'est une première : le musée Dapper présente de remarquables œuvres des arts d'Angola. Un univers fascinant, un ensemble artistique rare. A découvrir.
Faisant partie intégrante de l'Afrique équatoriale, l'Angola a été un des premiers pays 'visités' par les Européens. En 1482, quand l'expédition mandatée par le roi du Portugal débarque dans l'estuaire du fleuve Zaïre, ce ne sont pas des 'sauvages' qui les accueillent, mais un royaume Kongo très organisé. Dans un premier temps, pendant plus d'un siècle, tout se passe dans un intérêt commercial mutuel. Mais avec l'arrivée d'autres colonisateurs, les conversions au christianisme, les luttes territoriales et la traite négrière, les relations s'enveniment. Pour les Kongo, c'est le repli vers la forêt, la désunion des tribus, la ruine des ressources. On survit comme on peut, mais avec les années se poursuit le culte des ancêtres basé sur le souvenir des ces années plus pacifiques, plus prospères. Et notamment sur le mythe du héros civilisateur, l'esprit de Chibinda Ilunga.
C'est lui qu'honorent nombre de statuettes et d'objets patinés en bois sombre finement ciselé présentés dans la première salle de l'exposition du musée Dapper à Paris.
Des représentations aux épaules larges, aux narines dilatées, aux yeux clos, signes d'un pouvoir aux aguets, accompagnées de sceptres sculptés, de trônes décorés, d'armes d'apparat, symboles d'une évidente autorité respectée par le peuple Chokwé. Venus de nombre de musées portugais (la puissance coloniale de l'Angola jusqu'à l'indépendance de 1975), mais aussi de musées belges et français (Dapper et Quai Branly), ces objets majeurs sont ainsi réunis pour la première fois.
Au premier étage, ce sont des figures d'autres tribus voisines qui sont mises en valeur, en particulier les redoutables 'Minkisi' des peuples Yombé, Woyo ou Vili. Il s'agit d'impressionnantes statuettes plantées de clous rouillés et de lames de fer dans un corps massif, parfois avec sur le ventre, un reliquaire fermé par un miroir sensé repousser le mal. Ces fétiches, très recherchés aujourd'hui par les collectionneurs car les missionnaires ont brulé nombre de ces pièces 'hérétiques', consituent une entité spirituelle intermédaire entre un individu et un sorcier, servant à protéger contre les dangers, les maladies notamment.
Sont aussi en vitrine, bien différents des pièces Chokwé du rez de chaussée car plus colorés, plus clairs, plus variés, des masques Ndnunga, des parures Himba, des figures de fertilité Mwila, des cadres culturels Holo, des tambours Zombo, des jarres Mbundu et quelques objets Kuluzu, croix utilisées avant l'invasion portugaise mais que les chrétiens ont transformés en crucifix décorés.
Visiblement, le musée Dapper , 'petite' structure privée spécialisée, ne se laisse en rien impressionner par le mastodonde institutionnel qu'est le musée du Quai Branly, le seul établissement dédié uniquement aux arts primitifs dans le monde. Avec ses140 pièces souvent exceptionnelles, cette exposition met à l'honneur un réel patrimoine artistique et culturel peu connu. A découvrir.
Jusqu'au 10 juillet, musée Dapper, 35 bis rue Paul Valéry, 75016 Paris, renseignements : www.dapper.com.fr. Très instructif catalogue de 308 pages, 34 euros.
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