samedi 16 avril 2011

Nègre blanc je suis fils de Césaire!



J'aime Césaire, je l'aime passionnément. Par lui, me découvrant nègre blanc, j'ai conservé l'espoir de ceux qui perdent tout; et sur les barricades des cités de l'acier c'est d'un souffle "Césairien" que ma voix accompagnait des milliers de gorges hurlant "Longwy vivra!"
Plus tard c'est encore lui qui montrait le chemin lorsque jeune émigré j'apprenais l'autre, voyant ses différences comme des richesses utiles plutôt que des dangers à combattre. Il était avec moi lorsqu'enfin libéré des rages escarpées d'une jeunesse déchirée j'ai abordé avec confiance la route aux mille sentiers de la Francophonie et sa diversité. Grâce à lui j'ai compris les limites du "je" et rejoint par ses yeux l'Hawaiki des vivants permettant à mon arbre d'apprendre la forêt.
Aussi, plus que quiconque, je perçus comme un dû l'hommage du Panthéon. Mais enfant de Césaire il me faut réagir lorsque la "chosification" par un subtil changement de proie renaît tel un phénix de reproches injustes dont l'âme du poète saisirait les dangers.
A la question de ce qu'il ressent à un tel moment, comment Jacques Césaire, fils aimé d'Aimé et sang du "Corps perdu" peut il répondre" J'ai envie de dire "ENFIN!" et se plaindre du traitement réservé, dans les écoles, à l'œuvre de son père? La pensée de Césaire n'est elle pas partagée, stimulée, étudiée? Le "combattant inlassable" n'est-il pas désormais auprès des plus grands? La nation n'a-t'elle pas rendu là le plus beau des hommages? Le silence bruyant de cette reconnaissance n'exprime t'il pas les regrets attendus sur les horreurs passées? Pourquoi ces paroles partisanes et réprobatrices à l'heure des espoirs? La révolte de l'ombre a t'elle un gout si fort que les gestes de paix ne saurait le gommer? Le puits des accusations est-il sans fond? Révolte et culpabilité se transmettent-elles en héritage?
En un instant, toutes ces questions et pensées m'ont submergées. Et dans cette tempête qui m'emportait l'esprit c'est Césaire à nouveau qui m'a tendu la main, rendant par ses écrits mon esprit plus serein:
"C'est quoi une vie d'homme? C'est le combat de l'ombre et de la lumière… C'est une lutteentre l'espoiret le désespoirentre la lucidité et la ferveur… Je suis du côté de l'espérance, mais d'une espéranceconquiselucide, hors de toute naïveté."
Le tronc n'a pas toujours l'humilité de ses racines et le sang de nos pères s'il nous transmet leur vie en exclu le partage des expériences vécues.
Oui, par ma vie je suis fils de Césaire! Son fils l'est il aussi ?

Dominique Hoppe

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