Inouïe, la puissance avec laquelle des mots peuvent traverser les océans et les périodes pour marquer l’histoire collective. Aujourd’hui, outre la Martinique, les Caraïbes et la France, c’est toute l’Afrique et l’océan Indien qui saluent, avec la même émotion, la mémoire d’Aimé Césaire, l’«éveilleur de conscience», dans la pluralité des luttes contre l’esclavage, le colonialisme et autres atteintes aux droits des opprimés. Disparu le jeudi 17 avril, à l’âge de 94 ans, celui qui a eu droit dimanche à des obsèques nationales, était un phare pour la région et les peuples du Sud.
L’action politique de Césaire se retrouve dans ses écrits littéraires. L’héritage est conséquent. Il a œuvré pour le réveil des identités culturelles, la dignité humaine et la responsabilité historique des peuples. Dans cette optique, il a fondé les «Editions Présence africaine», dont la vocation est de donner un moyen d’expression aux auteurs d’Afrique, des Caraïbes et de l’océan Indien.
Avec son grand frère africain, Leopold Sedar Senghor, Césaire a repensé la phrase du philosophe allemand Hegel : «Ce n’est pas par la négation du singulier que l’on va à l’Universel, mais par l’approfondissement du singulier». Et la fameuse réplique de Césaire à Senghor alors qu’ils se cherchent dans une université occidentale : «Tu vois, finalement plus nous serons Nègres, plus nous serons des Hommes ».
Il jette ainsi les bases du concept de «Négritude», dont il refuse de revendiquer seul la paternité. Se basant sur ce concept de révolte, bien des années plus tard, la loi Taubira (2001) stipulera que : «La République française reconnaît que la traite négrière transatlantique ainsi que la traite dans l’océan Indien d’une part, et l’esclavage d’autre part, perpétrés à partir du XVe siècle, aux Amériques et aux Caraïbes, dans l’océan Indien et en Europe contre les populations africaines, amérindiennes, malgaches et indiennes constituent un crime contre l’humanité. »
C’était sans doute la plus belle victoire du «nègre», insulté alors qu’il traversait une rue à Paris, et qui aujourd’hui, pourrait se retrouver au Panthéon.
A La Réunion, on lui a rendu un vibrant hommage en début de semaine. Ils étaient nombreux à venir entendre les mots de Césaire, lus avec émotion à la mairie du Port. Lors d’une autre cérémonie à La Possession, le maire Roland Robert raconte : «J’ai eu le privilège – et ce mot prend aujourd’hui toute sa dimension –, de rencontrer à deux reprises, à Fort-de-France, Aimé Césaire. J’en garde le souvenir d’un homme ouvert sur le monde, à l’affût de la moindre injustice. Et en même temps, un homme intériorisé, en quête permanente du meilleur de soi, et de l’Humanité ».
Aux Comores, alors que la crise diplomatique s’enlise entre l’Union, qui réclame le fugitif Bacar et la France qui le «protège de la peine de mort en vigueur aux Comores», l’hommage à Césaire a été non moins poignant. Dans un «article-hommage», le journaliste Ali Mohamed écrit : «Chaque fois que j’entends parler du phénomène de changement climatique dû à l’action de l’homme sur son environnement, je pense à un poème résolument prémonitoire d’Aimé Césaire qui rappelle ceci : pour ceux qui n’ont inventé ni la poudre ni la boussole /ceux qui n’ont jamais su dompter la vapeur ni l’électricité/ ceux qui n’ont exploré ni les mers ni le ciel».
Ce poème écrit à la fin des années 40, à une époque où on exaltait encore le développement industriel en reprochant à l’Afrique de n’avoir pas contribué aux découvertes qui «révolutionnent le monde » prend toute son importance avec la crise alimentaire qui a cours, surtout après une conférence de la Southern African Development Community sur la pauvreté, qui a laissé tout le monde sur sa faim, fait ressortir le Comorien Ali Mohamed.
« Ma négritude n’est ni une tour ni une cathédrale », écrivait le poète dans son Cahier d’un retour au pays natal. Ce cri de révolte contre toute forme d’oppression, un bond douloureux et éblouissant vers l’universel, demeure une arme miraculeuse aujourd’hui encore... C’est pour cela que Césaire vivra pour toujours. Au Panthéon de tous les opprimés d’hier et d’aujourd’hui.
Nad SIVARAMEN
L’action politique de Césaire se retrouve dans ses écrits littéraires. L’héritage est conséquent. Il a œuvré pour le réveil des identités culturelles, la dignité humaine et la responsabilité historique des peuples. Dans cette optique, il a fondé les «Editions Présence africaine», dont la vocation est de donner un moyen d’expression aux auteurs d’Afrique, des Caraïbes et de l’océan Indien.
Avec son grand frère africain, Leopold Sedar Senghor, Césaire a repensé la phrase du philosophe allemand Hegel : «Ce n’est pas par la négation du singulier que l’on va à l’Universel, mais par l’approfondissement du singulier». Et la fameuse réplique de Césaire à Senghor alors qu’ils se cherchent dans une université occidentale : «Tu vois, finalement plus nous serons Nègres, plus nous serons des Hommes ».
Il jette ainsi les bases du concept de «Négritude», dont il refuse de revendiquer seul la paternité. Se basant sur ce concept de révolte, bien des années plus tard, la loi Taubira (2001) stipulera que : «La République française reconnaît que la traite négrière transatlantique ainsi que la traite dans l’océan Indien d’une part, et l’esclavage d’autre part, perpétrés à partir du XVe siècle, aux Amériques et aux Caraïbes, dans l’océan Indien et en Europe contre les populations africaines, amérindiennes, malgaches et indiennes constituent un crime contre l’humanité. »
C’était sans doute la plus belle victoire du «nègre», insulté alors qu’il traversait une rue à Paris, et qui aujourd’hui, pourrait se retrouver au Panthéon.
A La Réunion, on lui a rendu un vibrant hommage en début de semaine. Ils étaient nombreux à venir entendre les mots de Césaire, lus avec émotion à la mairie du Port. Lors d’une autre cérémonie à La Possession, le maire Roland Robert raconte : «J’ai eu le privilège – et ce mot prend aujourd’hui toute sa dimension –, de rencontrer à deux reprises, à Fort-de-France, Aimé Césaire. J’en garde le souvenir d’un homme ouvert sur le monde, à l’affût de la moindre injustice. Et en même temps, un homme intériorisé, en quête permanente du meilleur de soi, et de l’Humanité ».
Aux Comores, alors que la crise diplomatique s’enlise entre l’Union, qui réclame le fugitif Bacar et la France qui le «protège de la peine de mort en vigueur aux Comores», l’hommage à Césaire a été non moins poignant. Dans un «article-hommage», le journaliste Ali Mohamed écrit : «Chaque fois que j’entends parler du phénomène de changement climatique dû à l’action de l’homme sur son environnement, je pense à un poème résolument prémonitoire d’Aimé Césaire qui rappelle ceci : pour ceux qui n’ont inventé ni la poudre ni la boussole /ceux qui n’ont jamais su dompter la vapeur ni l’électricité/ ceux qui n’ont exploré ni les mers ni le ciel».
Ce poème écrit à la fin des années 40, à une époque où on exaltait encore le développement industriel en reprochant à l’Afrique de n’avoir pas contribué aux découvertes qui «révolutionnent le monde » prend toute son importance avec la crise alimentaire qui a cours, surtout après une conférence de la Southern African Development Community sur la pauvreté, qui a laissé tout le monde sur sa faim, fait ressortir le Comorien Ali Mohamed.
« Ma négritude n’est ni une tour ni une cathédrale », écrivait le poète dans son Cahier d’un retour au pays natal. Ce cri de révolte contre toute forme d’oppression, un bond douloureux et éblouissant vers l’universel, demeure une arme miraculeuse aujourd’hui encore... C’est pour cela que Césaire vivra pour toujours. Au Panthéon de tous les opprimés d’hier et d’aujourd’hui.
Nad SIVARAMEN
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