Infatigable promoteur de l'autonomie, et non de l'indépendance, de la Martinique, Aimé Césaire, qui est décédé jeudi, fut de tous les combats contre le colonialisme et le racisme.
"Je suis un écrivain engagé même si je n'aime pas ce mot (...). Un intellectuel antillais ne peut se retirer sous la tente: le combat pour la dignité et la liberté est un combat quotidien", disait-il en 1982.
Etudiant, il milite à Paris aux côtés des étudiants noirs anticolonialistes. De retour dans son île en 1939, il s'oppose au régime vichyste, qui interdit sa revue "Tropiques".
Il entre en politique en 1945 comme député de la Martinique, avec le soutien du Parti communiste. Un an plus tard, il est le rapporteur de la célèbre loi qui transforme en "départements" les vieilles colonies sucrières et bananières ultramarines (Martinique, Guadeloupe, Guyane et Réunion). Certains l'accusent alors de reniement car ce processus peut conduire à l'assimilation.
"Quand on m'a pressenti pour cette mission, j'ai hésité car j'ai pensé à nos ancêtres, à notre identité et à ce qu'il en resterait si nous devenions des Français. Mais je me suis rendu compte que c'étaient les gens du peuple qui tenaient le plus à ce que la Martinique devienne un département français", a-t-il expliqué.
Pour lui, il s'agit avant tout d'obtenir l'égalité sociale. "Quand, en France, on disait +assimilation+, on pensait +centralisation+. Mais quand les Martiniquais disaient +assimilation+, ils pensaient +justice sociale+ et +égalité+, précisait-il.
Il quitte le PCF en 1956 après la répression soviétique contre les insurgés de Budapest. "Au Parti, ils étaient colonialistes sans le savoir : au siège, il y avait même un +ministre+ des colonies, cela je ne l'acceptais pas", a-t-il dit, parlant aussi de son opposition au bureaucratisme stalinien.
Dans un discours prémonitoire à la Sorbonne en 1948, "le nègre rebelle", il lance: "le racisme est là. Il n'est pas mort. En Europe, il attend de nouveau son heure, guettant la lassitude et les déceptions des peuples. En Afrique, il est présent, actif, nocif, opposant musulmans et chrétiens, juifs et arabes, blancs et noirs, faussant radicalement l'angoissant problème du contact des civilisation".
En 1957, il fonde le Parti progressiste martiniquais (PPM) qui revendique l'existence d'une communauté historique martiniquaise et veut jouer le jeu de la décentralisation. Il le préside jusqu'en 2005.
En 1958, Césaire n'accorde qu'un "oui" réticent à de Gaulle puis soutient sans réserve son ami Mitterrand aux présidentielles de 1981 et 1988. Il verra dans la décentralisation voulue par le président socialiste la reconnaissance de l'identité martiniquaise.
"Sur cette question, estimait-il toutefois en 2001, la France est singulièrement en retard par rapport à d'autres pays européens. On a commencé par la décentralisation mais elle est timide. Il faut aller jusqu'au bout de la décentralisation et aller à l'autonomie".
Fidèle à sa doctrine et anticolonialiste résolu, Aimé Césaire avait prévenu fin 2005, qu'il ne recevrait pas Nicolas Sarkozy, qui devait se rendre aux Antilles comme ministre de l'Intérieur. "Je ne saurais paraître me rallier à l'esprit et à la lettre de la loi du 23 février 2005", expliquait-il, en référence à l'article 4 "reconnaissant le rôle positif de la présence française outre mer". Il l'avait finalement reçu en mars 2006 et lui avait offert "Discours sur le colonialisme".
Blog dédie au poète Aimé Césaire notamment à son oeuvre, sa poésie et collectant les articles qui ont été publiés sur ce grand homme martiniquais
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